07/04/23 – La paquet de gâteau du dimanche

 

LE PAQUET DE GÂTEAUX DU DIMANCHE MATIN

Des gâteaux séparés, bien sûr. Une religieuse au café, un paris-brest, deux tartes aux fraises, un mille feuilles. A part pour un ou deux, on sait à qui chacun est destiné, mais quel sera celui-en-supplément-pour-les-gourmands ? On égrène les noms sans hâte. De l’autre côté du comptoir, la vendeuse, la pince à gâteaux à la main, plonge avec soumission vers vos désirs; elle ne manifeste même pas d’impatiente quand elle doit changer de carton, le mille-feuille ne ne tient pas. C’est important ce carton plat, carré, aux bords arrondis, relevés. Il va constituer le socle solide d’un édifice fragile, au destin menacé. Ce sera tout !

Alors la vendeuse engloutit le carton plat dans une pyramide de papier rose, bientôt nouée d’un ruban brun. Pendant l’échange de monnaie, on tient le paquet par en dessous, mais dès la porte du magasin franchie, on le saisit par la ficelle, et on l’écarte un peu du corps. C’est ainsi. Les gâteaux du dimanche sont à porter comme on tient un pendule  Sourcier des rites minuscules, on avance sans arrogance, ni fausse modestie. Cette espèce de componction, de sérieux de roi mage, n’est-ce pas ridicule ? Mais non.

Si les trottoirs dominicaux ont un goût de flânerie, la pyramide suspendue y est pour quelque chose autant que ça et là quelques poireaux dépassant d’un cabas.

Paquet de gâteaux à la main, on a la silhouette du professeur Tournesol, celle qu’il faut pour saluer l’effervescence d’après messe et les bouffées de P.M.U., de café, de tabac.

Petits dimanches d’autrefois, petits dimanches d’aujourd’hui, le temps balance en encensoir au bout d’une ficelle brune. Un peu de crème pâtissière a fait juste une tache en haut de la religieuse au café.

Extrait de La première Gorgée de Bière et autres plaisirs minuscules

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